Écrit par violette

Love Your Waste agit en faveur du recyclage des déchets alimentaires et de la lutte contre le gaspillage. Découvrez l’histoire de la start-up qui a réussi à fédérer autour de la gestion des déchets.

Love your waste

15 avril 2015, 12:30 — École primaire du IXème arrondissement, D.

D., 9 ans, louche sur le plateau de son voisin, M., où une pomme qui semble avoir été oubliée trône tristement à côté d’un pot de yaourt vide et de sa serviette en papier tâchée de sauce tomate. Remarquant son air désespéré, et ayant, lui, la panse bien remplie, M. n’hésite pas à lui proposer le fruit. Ce n’est pas que M. soit particulièrement altruiste, mais il se souvient bien de l’autre jour, où les animateurs avait expliqué qu’il valait mieux donner ce qu’on n’avait pas mangé plutôt que de le jeter.

Après avoir englouti la pomme en une vitesse record, D. se lève de table avec son plateau. Elle se dirige vers la sortie et, sous le regard bienveillant des animateurs, suit à la lettre la nouvelle procédure : les restes dans la poubelle de gauche, les emballages comme son pot de yaourt dans la poubelle de droite. Elle aussi a bonne mémoire de la réunion de la semaine passée.

Les animateurs avaient rassemblé tous les élèves dans la cantine pour leur expliquer qu’ils mettaient en place un nouveau système de tri, qui ferait du bien à la planète. C’est vrai que tout le monde dit qu’elle est malade, la Terre, mais D. n’avait pas encore eu l’occasion de participer à la soigner.

F., son animatrice préférée, lui avait bien dit qu’en triant correctement ses déchets à la cantine, et en ne gâchant pas la nourriture, c’était comme si elle était un peu infirmière. En plus, il paraît qu’après les déchets sont transformés en énergie et que ça permet de chauffer l’eau de la douche, par exemple.

Au début, ce n’avait pas été si facile de comprendre comment sa peau de banane pouvait avoir un lien avec sa douche, mais F. avait bien pris le temps d’expliquer à tout le monde comment ça fonctionnait, avec des jeux en plus ! C’était chouette, et maintenant, à chaque fois qu’elle va à la cantine ou dépose son plateau, D. se sent un peu comme une super-héroïne-infirmière qui fait du bien à la planète.

Love your waste

15 avril 2015, 13:30 — Ecole primaire du IXème arrondissement, R.

Ouf, encore un repas sans incident. R. termine de ranger la cuisine avec ses collègues. Depuis quelques jours, ils ont de nouvelles consignes : ils trient.

Une jeune entreprise est venue les voir il y a quelques semaines pour leur parler d’un nouveau projet. Love Your Waste, quel drôle de nom ! Il s’agissait simplement de mettre en place de nouvelles habitudes de gestion des déchets, afin de limiter le gaspillage, améliorer le recyclage, et même produire de l’énergie. “Méthanisation”, qu’ils appellent ça. R. n’avait jamais entendu ce mot-là avant. Mais après la formation, elle a compris tout ce que ça avait à offrir, et l’idée lui a plu ! Dix ans qu’elle jetait les restes à la poubelle sans se poser de question. Que ces déchets puissent concrètement servir à quelque chose lui semble une bonne chose. D’ailleurs, maintenant qu’ils s’y sont mis, R. ne sait plus vraiment pourquoi ils ne le faisaient pas déjà avant, c’est tellement simple !

Par contre, il va falloir se dépêcher de tout ranger. C’est encore le bazar dans les cuisines et les gens d’énergies9 ne vont pas tarder à passer pour récupérer les déchets triés. C’est eux qui les amènent à l’usine de méthanisation. Ça aussi, ça lui plaît bien à R., parce que les gens d’énergies9, ce sont des personnes en insertion professionnelle. Ils ont passé beaucoup de temps à galérer, ce sont des chômeurs de longue durée. Pour eux, participer à la collecte, c’est revenir sur le marché du travail !

27 janvier 2016, 14h30 — SenseSpace, Juliette.

27 janvier 2016, 14h30 — SenseSpace, Juliette.

Juliette sort d’une formation dispensée par un mentor du SenseCube, l’incubateur social de MakeSense. Cette fois-ci, il s’agissait de conseils sur la meilleure façon de toucher son public sur les réseaux sociaux. Plutôt bienvenue cette formation, car Love Your Waste est en pleine campagne de communication dans le cadre de sa participation au concours de La Fabrique Aviva.

Voilà deux ans que Juliette s’est lancée dans l’aventure de l’entrepreneuriat, aux côtés de Tanguy et Jérôme. Ce dernier avait une idée qui lui trottait dans la tête depuis qu’il avait lu un article sur une nouvelle loi à venir au sujet du tri des déchets alimentaires. Il connaissait plutôt bien une association d’insertion sociale dans le IXème et avait envie de créer quelque chose qui fasse le pont entre le recyclage et l’emploi.

Aux débuts de Love Your Waste, il y avait vraiment peu d’informations sur le recyclage et la valorisation des déchets. Pendant 9 mois, la petite équipe a mené son enquête auprès de tous les acteurs du secteur afin d’affiner l’idée et de construire le projet. Ce fut un travail de longue haleine ! Mais au bout du compte, en décembre 2014, leur projet commençait à devenir plutôt sérieux. Au même moment, ils ont été sélectionnés par la Mairie de Paris dans le cadre de l’appel à projet “Amélioration du Métabolisme Urbain”, et par le SenseCube pour intégrer l’incubateur. Après 9 mois d’études de faisabilité sur le terrain, cette confiance faisait du bien !

Pendant 6 mois d’accompagnement au SenseCube Juliette, Jérôme et Tanguy ont pu développer des relations privilégiées avec des entrepreneurs de la même trempe qu’eux, ont eu accès à de nombreuses formations, soit autant de piqûres de rappel de leurs connaissances universitaires un peu floues ou lointaine, mais, surtout, ils ont pu commencer à mener une expérimentation. La méthode du SenseCube, c’est l’itération : se confronter à la réalité, tester, apprendre, et évoluer. En avril 2015, Love Your Waste signait donc pour un premier essai dans 4 écoles du IXème arrondissement. Et ça a tellement bien marché, que deux mois plus tard, le système de tri des déchets alimentaires, les formations et actions de sensibilisation du personnel et des enfants, étaient appliqués dans deux nouvelles écoles.

Love your waste

On a commencé à parler d’eux : du Parisien au Ministère du Développement Durable. Et en chemin, ils ont gagné pas mal de reconnaissances par le CleanTech Open, la Commission Européenne et même la COP21 où ils ont été invités au Grand Palais, à Bercy et à la Mairie de Paris pour représenter leur initiative. Pour Juliette, la COP21 ça a vraiment été l’apothéose de leur projet jusque-là. Elle se doutait bien que le concept de Love Your Waste fonctionnerait, mais jamais qu’il fonctionnerait aussi bien. En fait, leur projet va au-delà de ce qui était, à la base, de l’insertion sociale et de la valorisation des déchets alimentaires.

Aujourd’hui, Love Your Waste, c’est un vrai projet fédérateur, c’est de la sensibilisation, ce sont des générations croisées qui se retrouvent porteuses d’un projet commun à fort impact social. Love Your Waste montre que les mentalités peuvent changer, que transformer les déchets en ressources c’est possible, et que mettre en contact des acteurs qui existent déjà est souvent la clé du succès !

Mais Juliette, Jérôme et Tanguy sont loin de s’arrêter là. Ils mènent actuellement des études plus poussées sur le gaspillage alimentaire, dans les restaurants par exemple. Et puis, ils aimeraient bien trouver des fonds et des partenaires pour développer encore plus leur entreprise. Les prochaines étapes, c’est d’investir dans une plate-forme intelligente permettant de mieux connecter les acteurs du dispositif, d’améliorer leur système logistique afin de le rendre encore moins impactant sur l’environnement, et de trouver de nouvelles manières d’engager les individus dans cette démarche positive. Des projets, ils en ont pleins, et Juliette est impatiente de les développer !

Rejoignez le mouvement et la mobilisation Organic Waste 2019